mardi, juillet 16, 2013

Nelson Mandela : Quel héritage ?

Comme vous le savez, l'ancien président sud-africain, âgé de 94 ans et bientôt 95 ans dans deux jours, est hospitalisé pour une rechute de l'infection pulmonaire qu'il avait contractée en décembre 2012.

Oui, Mandela est un grand homme car il n’a jamais été le chef d'un groupuscule noir qui s'est transformé sur le tard, une fois arrivé au pouvoir. Avant et pendant son emprisonnement, il a toujours refusé des idées sectaires, tenant, ainsi, à défendre une idée haute de la démocratie. C'est pourquoi, d’ailleurs il faisait tant peur aux chefs de l'apartheid.

La force de son engagement était telle car, après tout, il aurait pu rester dans son Tanskei natal, accepter la soumission (de l'apartheid, mais aussi de son clan traditionnel qui voulait lui imposer une femme par exemple) et vivre une relative aisance matérielle au sein du clan royal des Thembu.

Mais le fils dit non à sa famille et se lança, ainsi dans l'activisme militant. En 1948, il a déjà signé un pacte avec la lutte lorsque les extrémistes blancs instaurent un programme politique nauséabond: "die kaffer op sy plek" ("le nègre à sa place") fondé sur la peur du "Swart Gevaar" ("péril noir"). Rapidement, la révolte dont il est l'un des leaders le jette plus d'une fois en prison, et pour longtemps, vingt-sept ans plus précisément.


C'est ainsi là une réalité incontestable: le leader sud-africain incarne à la fois cet espoir en l'humain, mais aussi un certain cynisme destructeur des systèmes politiques. De là à faire le lien avec des questions importantes d'actualités, concernant notamment des peuples encore dominés, il n'y a qu'un pas...

Jusqu'au bout, Mandela a défendu une liberté partagée et inclusive, jusqu'à se faire des ennemis parmi les cercles extrémistes noirs qui ne rêvaient que de revanche à l'encontre des blancs... Jusqu'à renier celle qui était encore son épouse,Winnie Mandela, parce qu'elle devenait à ses yeux d'une radicalité insupportable. Lors de son discours du 11 février 1990 depuis l’hôtel de ville du Cap, ne dit-il pas d’ailleurs : « J’ai lutté contre la domination blanche, et j’ai lutté contre la domination noire. Mon idéal le plus cher a été celui d’une société libre et démocratique dans laquelle tous vivraient en harmonie et avec des chances égales ».

Enfin, Madiba incarne une pensée profondément sociale car ceux qui le connaissent bien parlent d’un homme véritablement convaincu que les droits politiques sont intimement liés aux droits sociaux. D'ailleurs dans son livre autobiographique, Un long chemin vers la liberté, il avoue qu’au début de son combat contre l’injustice, il avait des idées beaucoup plus avancées sur le plan social que sur le plan politique. Pour confirmer ces propos, Mandela affirme, par rapport au débat actuel sur la nature de la responsabilité sociale des Etats et des citoyens, que vaincre la pauvreté n'est pas un geste de charité mais un acte de justice.


Pour clore cet article, gardons à l'esprit cet extrait du discours de Mandela en 1998, à la veille de son retrait officiel de la vie politique: « Quand je serai chez moi à Qunu, aussi vieux que les collines des alentours, je continuerai de nourrir l’espoir qu’une nouvelle race de dirigeants est apparue dans mon pays et dans ma région, sur mon continent et dans le monde, qui ne permettra pas que l’on prive quiconque de la liberté, comme nous en avons été privés si longtemps; qui ne fasse de personne un réfugié, comme nous l’avons été; que personne ne soit condamné à la famine, comme nous l’avons été; que personne ne soit privé de sa dignité humaine, comme nous l’avons été ».